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QUESTIONS d'ACTUART

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25 avril 2013 4 25 /04 /avril /2013 10:34

 

La chronique n° 39 de Nicole Esterolle 

texte que vous pouvez trouver aussi sur le site : www.schtroumpf-emergent.com, sur Mic Mag, le magazine des médias libres : www.micmag.net/es/voz-libre , sur www.actuartlyon.com et sur le site Défi Culturel :  http://www.sauvonslart.com/

 

A l’occasion des « Entretiens sur les arts plastiques », organisés par Frédéric Mitterrand debut 2011, et au cours de l’une des tables rondes sur « l’international », animée par Nicolas Bourriaud, on a pu voir Olivier Kaeppelin notre dernier DAP (délégué aux Arts Plastiques, ministre de l’art contemporain en quelque sorte), se lever brusquement en fond de salle et déclarer « L’ État a eu tout faux et devrait tout changer pour favoriser la diversité sans prendre position pour l’évaluation des artistes ». 

Silence glacial de l’auditoire, bien évidemment, complètement  liquéfié (1) par cette déclaration d’un vieux commis de l’Etat au service de l’art Contemporain officiel depuis une bonne trentaine d’années (2) et qui se met à balancer ce qu’il a sur le coeur…Imaginez en effet , qu’au cours d’une réunion du Politburo sous Staline ou Brejnev, tel vieil apparatchik se lève pour lâcher tout de go  que le soviétisme «  a tout faux », qu’il a détruit l’économie, déshumanisé la société , etc… Eh bien la déclaration de Kaeppelin, c’était un peu le même pavé dans le même vieille soupe : nous avons , avec l’argent public, déshumanisé  la création artistique, saccagé  les systèmes de reconnaissance, ravagé les critères d’évaluation esthétiques, méprisé 95% des artistes et des galeries prospectives,  etc. D’où la grosse tétanie dans l’auditoire de professionnels confédérés de l’AC, qui n’en pensaient pas moins pour la plupart, mais qui n’avaient  jamais osé le dire, terrifiés à l’idée de se faire, non pas envoyer au goulag, mais virer de l’organigramme ministériel.

 

Ambiance de terreur donc à tous les étages de la forteresse « art contemporain », et je vous joins un texte  de la journaliste Ariane Warlin 1 sur ce qui se passe au Musée du Louvre en proie à l’art contemporain et récemment investi par Jan Fabre et son gros ver de terre, et actuellement par Wim Delvoye avec un énorme suppositoire en dentelle sous la pyramide d’entrée. Angoisse sourde et non localisable, pire qu’au politburo, parce que, dans ce lieu où tout le monde est subalterne, on ne sait plus qui terrifie qui et d’où vient la menace. ( voir la suffisance, la crétinerie et le cynisme terrifiants en effet   de ce Wim Delvoye – fameux  inventeur de la machine à merde et de quantité d’inepties porcines ou dentellières - sur : http://www.dailymotion.com/video/xrbb97_wim-delvoye-l-art-et-la-lutte-des-classes_creation#.UQjZSOgsp7w

Il faut dire que ce dirigisme d’Etat, quand il concerne la  création artistique, c’est la transgression créative- voire « performative » - obligatoire, c’est la non transgression qui devient transgressive, c’est le   fameux « désobéissez-moi », psychologiquement ravageur, qui est à l’œuvre pour la fabrication d’un fonctionnariat  aussi docile que schizophrène, c’est la double injonction comme arme du pouvoir particulièrement terrifiante parce qu’insoluble, et c’est ce qui explique pourquoi, dans le personnel institutionnel voué à l’AC, on trouve au mieux des cyniques ou des pervers, au pire de grands schizoïdes à tendance paranoïaque, ou de parfaits hébétés complétement lobotomisés.

Alors, comment cette forteresse de la boursoufflure délirante tient-elle encore debout, et pourquoi ne s’écroule-t-elle pas sur sa propre terrifiante inanité ? Eh bien tout simplement parce que ce dirigisme d’Etat est lui même dirigé, soutenu, conforté, par le business art international, qui est lui-même  indexé à la grande finance toujours prospère autant que sans foi ni loi ni régulation possible…Un financial art   qui fournit donc à l’ État le soutien financier et le  modèle  esthétique qui va avec. Et c’est ainsi qu’en toutes logique et impunité, Mr Aillagon utilise le Château de Versailles et Mr  Loirette le Musée du Louvre pour la valorisation des produits artistico-financiers de Mr Pinault. 

C’est cette collusion structurelle entre pouvoirs publics et grands intérêts privés, entre l’art officiel et la finance internationale, entre spéculation intellectuelle et spéculation financière, qui garantit l’impunité de cet  art contemporain d’état, où le conflit d’intérêt est inhérent ou consubtanciel, et qui compense son défaut de contenu ou d’intériorté, en développant  à l’extérieur de lui, une sorte d’enrobage d’épaisse crème fouettée relationnelle et communicationnelle, faite d’un mélange inextricable des genres, d’ abus de biens sociaux, patrimoniaux,  de conflits ou prises illégales   d’intérêts, de toutes sortes, etc.

La seule façon d’extraire l’art de cette situation de non-sens et  de non-droit, est donc le recours juridique pour le traitement de ce grand mélange des genres et de cette culture du conflits d’intérêts dans l’institution..L’arsenal juridique existe : il suffirait de l’appliquer, tel que nous l’explique l’avocat Roland Lienardt dans le texte 2

Vous pouvez aussi lire, du même auteur,  le « Petit Bréviaire de la corruption au ministère de la culture et de la communication
et dans ses dépendances 
» sur le lien  http://www.nodula.com/Pantouflage_du_mois.html

1-chacun arborant une mine aussi déconfite que celle du type qui vient d’apprendre que sa meuf s’est tirée avec Michel Onfray

2 - et tout heureux aujourd’hui de se sauver  de la sombre pétaudière qu’il a administrée si longtemps , pour aller couler des jours plus heureux au soleil méditerranéen de la Fondation Maeght.

 

Le colloque du 23 janvier 2013 au Sénat 

Ce colloque organisé par l’association Le Défi Culturel, avec le parrainage de Yann Gaillard, Sénateur de l'Aube, de Marie-Christine Blandin, Sénatrice du Nord, et de Marc Fumaroli, Membre de L'Académie Française , et animé par Christine Sourgins, a vu les interventions de Aude de Kerros, Laurent Danchin, François de Verdière, Noël Coret, Marie Sallantin, Ariane Warlin, Jean-Philippe Domecq, Pierre Souchaud, Pierre Lamalattie, Jérome Serri, Margaux Berry, Raphael Jodeau et Roland Lienardt.

Les videos de toutes ces interventions, y compris celles qui sont reproduites tout ou partie ci-dessous, sont visibles sur le lien : http://www.sauvonslart.com/modules/news/article.php?storyid=68589 

 

Faites circuler les textes du colloque !

Il ne faut pas compter sur la gauche germanopratine mollassement correcte de type Libération, Le Monde, Le Nouvel Obs, Inrock, etc, (collabobos objectifs du système financier dominant) pour rendre compte de ce qui s’est dit dans ce colloque. Alors c’est sur vous, chers lecteurs, que nous comptons pour déjouer cette espère d’omerta, pour faire circuler l’information indispensable,  pour arrêter ce délire étatisé de l’Art Contemporain.

Imprimez ces textes , archivez-les, transmettez-les aux amis, aux responsables culturels, aux politiques, aux journalistes  que vous connaissez, à votre élu le plus proche, etc… et l’histoire de l’art vous sera reconnaissante d’avoir contribué à casser le pouvoir de l’argent et de l’administration conjugués, pour une libre respiration de la création d’aujourd’hui.

 

1 -  Le Musée du Louvre en proie à l’art contemporain 

Une intervention de la journaliste Ariane Warlin au colloque « 30 ans d’art dirigé en France », organisé par Le Défi Culturel , au Sénat, le 23 janvier 2013 

J’ai publié, en février dernier, aux éditions Michalon, un livre consacré au musée du Louvre, intitulé « la face cachée du Louvre ». Quand j’ai commencé mon enquête au  musée, comme tout journaliste qui se respecte, j’ai dans un premier temps pris contact avec le service de presse du musée du Louvre. Mon objectif était de rencontrer Henri Loyrette, l’actuel directeur du musée. 

L’attachée de presse du musée, m’a opposé une fin de non recevoir. Me disant qu’il n’était pas question d’interviewer son directeur dans la mesure où le Louvre avait déjà ses propres éditions. Son message était clair : seul le Louvre pouvait parler du Louvre ! Je lui ai répondu que c’était comme si elle me disait que seul l’Elysée était habilité à parler du président de la République. J’ai insisté, mais rien n’y a fait. J’ai même envoyé un courrier avec A/R au président du Louvre, lequel est resté sans réponse. 

J’ai bien tenté de le contacter directement dans le musée après certaines de ses interventions. Mais là encore, il est resté très fermé, et a tourné les talons! Dans ma vie de journaliste, j’ai eu l’occasion d’enquêter sur un certain nombre de secteurs. Mais très clairement, c’est l’univers de la culture qui m’a paru le plus fermé. J’ai accédé beaucoup plus facilement à des dirigeants d’Areva qu’à nos élites qui dirigent les établissements publics. Comme quoi le nucléaire est plus aisément pénétrable que le petit monde de la culture !

J’ai bien entendu chercher à me rapprocher de personnes susceptibles de me parler de ce qui se passait dans les coulisses du musée. Je me suis rendue compte que la plupart étaient tétanisés à l’idée de prendre la parole, car ils avaient peur des représailles. Y compris des gens qui ne travaillaient plus au sein de l’établissement. Il a fallu les convaincre que je ne divulguerais pas leurs identités. J’ai pu constaté que régnait un réel climat de peur.

A défaut d’avoir pu obtenir une interview d’Henri Loyrette, j’ai cherché à me rapprocher des dirigeants d’autres établissements publics. Mais le contact a été tout aussi difficile à établir. A l’occasion de mon enquête, j’ai découvert à quel point la présence de l’art contemporain, des installations, des performances, était importante pour Henri Loyrette : en raison certainement des montages financiers et de la prétendue attirance des foules pour le très contemporain.

En interne, l’ambiance est tendue. Et même à l’extérieur, la dissidence est mal venue. Je citerais ici l’exemple de Michel Laclotte ou encore celui de Françoise Cachin, qui ont osé critiqué le Louvre Abu Dhabi, les vrais experts, ceux qui sont soucieux des collections, ont des décennies d’expérience sont écartés et maltraité ostracisés. Comme si les gens cultivés était une gêne.

Michel Laclotte a, du jour au lendemain, littéralement été rayé du conseil d’acquisitions des musées nationaux. Comme  Françoise Cachin  puis on lui enleva – en contradiction avec les statuts de cette association – la présidence de FRAME, l’association de musées franco-américains qu’elle avait fondée. 

Quant à Didier Rykner, qui avait aussi critiqué l’action du musée sur son site : « La tribune de l’art », il a été blacklisté et n’était plus jamais invité à aucun événement presse organisé par le Louvre, comme c’était le cas auparavant. Or Ryckner est un des rares contre pouvoir au système culturel or dans un pays démocratique où c'est l'argent du contribuable qui est en jeu, l'éliminer est absolument anormal Car le Louvre n'est pas une entreprise privée qui elle peut revendiquer de verrouiller sa communication.

Suite à la publication de mon livre, j’ai rédigé pour Défi Culturel un rapport sur l’art contemporain, qui m’a permis de constater, une fois de plus, à quel point le ministère de la culture guide les choix des galeristes , des maisons de vente aux enchères et la politique au sein des écoles d’art. La création est donc totalement dirigée et l’Etat est prescripteur. Les contribuables qui le plus souvent désapprouvent les choix opérés ne sont pas informé sur les critères de choix , subissent, n’ont pas leur mot à dire  L’art contemporain bénéficie ainsi d’un soutien financier impressionnant, sans compter que toutes les aides ne sont pas comptabilisées puisqu’elles sont souvent indirectes. Comme je l’explique ds ce rapport, très souvent aussi, l’argent qui est dévolu au patrimoine se retrouve par tout un jeu de vases communiquants dans l’escarcelle de l’AC. 

Les politiques font confiance aux experts et ne réalisent pas à quels points ces experts s’autoproclament dans un cercle fermé qui tourne en roue libre. Cependant un sénateur m’a quand même affirmé : "le pouvoir culturel est plus puissant que le pouvoir politique" 

 

2 - De l’approche juridique du délire Art Contemporain

Extrait d’une intervention de l’avocat Roland Lienhardt au colloque « 30 ans d’art dirigé en France », organisé par Le Défi Culturel , au Sénat, le 23 janvier 2013

La convention du 20 mars 2007 sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles

L’article 2 de la convention européenne sur la diversité culturelle pose comme premier principe directeur de cette diversité culturelle le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales

Cette convention rappelle donc qu’il ne peut y avoir de diversité culturelle sans démocratie et sans Etat respectueux de l’état de droit. L’exception culturelle ne peut pas être légitime si elle est basée sur la négation de la régle de droit et sur son contournement institutionnel. Elle sera un jour contrainte de respecter et d’appliquer ces principes. Il ne saurait y avoir de religion du bon gout ou de raison suprême imposant des choix artistiques. Une telle analyse reléve d’une conception religieuse de l’art, qui n’est pas acceptable dans une démocratie. C’est sur un tel fondement que les talibans détruisent les œuvres préislamiques.

Or, un rapport  commun de l’inspection général des finances et  de l’inspection générale de l’administration des affaires culturelles, publié en janvier 2007 établissait que 35,5 % des mécanismes de subvention du ministére de la culture n’avaient aucune base légale

Ce rapport conclut en indiquant que le ministére de la culture, en préférant exclusivement la subvention à l’appel d’offre, ´"fait un choix économiquement contestable et juridiquement risqué »

L’article 13 de la charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne énonce ´"l’art et la liberté académique sont libres ». Le parlement européen qui donne le mode d’emploi de cette charte énonce que l’art ne peut être d’avantage encadré que la liberté d’expression et la presse. Cela signifie qu’il ne saurait exister légalement de contrôle a priori sur l’art. Et cette charte a valeur de droit positif en France depuis le 2 décembre 2009.

 

3 – L’art contemporain face à la loi, un texte imparable de Christine Sourgins dont vous pouvez charger le PDF sur le lien suivant :

http://www.deficulturel.net/modules/TDMDownloads/singlefile.php?lid=8

 

4 - Art contemporain d’Etat : Bilan trentenaire 1983 – 2013 

Par Aude de Kerros 

En 1983, en quelques mois, le Ministère de la Culture a connu une grande métamorphose. Une bureaucratie a été crée ex nihilo dans le but de diriger tous les aspects de la création, de l’enseignement de l’art à sa consécration. En 2013 les DRAC, FRAC, CNAC vont donc célébrer leur trentième anniversaire.

C’est l’occasion de faire un bilan…études et rapports se succèdent, on se congratule, une place est faite comme il se doit à l’autocritique, afin de progresser encore. En France, le bien fondé de ces institutions que « le monde entier nous envie » ne se discute pas sur la place publique. 

Ce colloque a pour but de montrer comment ces Institutions ont détérioré le tissus vivant de la création par excès de zèle et de bons sentiments. 

Il s’inscrit à la suite de deux autres colloques qui ont eu lieu, le premier en 2003, ici même au Sénat ;  « Art Sénat », organisé par Marie Sallantin qui a réuni Philippe Dagen, Nathalie Heinich, Alain Quémin, Jean Philippe Domecq, etc. 

Le deuxième en 2007, à la Halle Saint Pierre : « Mettre les pendules à l’Art » avec la participation de Pierre Souchaud, de Laurent Danchin, Jean Philippe Domecq, Christine Sourgins, François Derivery, etc

Ces colloques sont l’expression  d’un  long travail de critique et d’analyse de la politique culturelle, soutenus par de nombreux écrits dont Laurent Danchin a fait une surprenante bibliographie.

Nous faisons ici particulièrement référence au livre de Marc Fumaroli, « l’Etat Culturel » qui, dix ans après la création de ces institutions, a fait les tous premiers constats. 

 

Chronologie des faits

Tout au long de la troisième et de la quatrième République l’Etat français est intervenu, par principe, le moins possible dans la vie artistique et culturelle. Il s’est limité à ses fonctions strictement régaliennes. Faisant par ailleurs confiance à l’expertise du milieu de l’art lui-même. Cette période a été une des plus brillantes de la vie artistique. Paris est devenu le lieu de rencontre du monde entier dans le domaine des arts. Artistes et amateurs y recherchaient son exceptionnel milieu de l’art, aussi divers et imprévisible que fécond. 

En 1958,  la Vème République crée un ministère dans le but de mettre la culture à portée de tous. 

En 1981,  le Ministère de la Culture change de politique et ambitionne de devenir un Ministère de la création. La « Direction des Arts Plastiques » prend  une importance majeure et se voit dotée de nouvelles institutions en 1983. Elle devient un ministère au cœur du ministère.  Le « Délégué des Arts plastiques » fait concurrence au Ministre car il dispose, cas unique dans l’administration, de son propre corps de fonctionnaires, les « conseillers » et « inspecteurs  de la création ».  Ces derniers ont le titre d’ « experts » et ont pour mission de diriger l’art. Autodidactes pour la plus part, ils sont recrutés dans l’urgence.  Dix ans plus tard, en 1993, Jack Lang institutionnalisera ces vacataires et créera  un corps administratif inamovible, recruté sur concours et à l’abri d’un statut très particulier, une exception administrative. Il est vrai que leur mission est hors normes: Juger ce qui est de l’art ou non, décréter ce qui est bon ou mauvais. Ils sont au dessus des lois qui régissent la fonction publique sur la question des marchés notamment. Dans leurs fonctions d’achat et de commande publique, il est admis qu’ils n’ont pas de justifications ni de critères à donner. Ainsi, ils ont largement échappé pendant trois décennies aux organismes de contrôle propres à l’administration : Cour des comptes, Conseil d’État, Inspection des finances.

La chose ne se fera pas néanmoins sans étonner quelques spécialistes de   l’administration. Le sociologue Vincent Dubois en 1999, fait paraître un rapport « La politique culturelle, genèse d’une catégorie d’intervention publique ».

 Il souligne l’étrangeté et le caractère « flou » et utopique de cette nouvelle activité de l’Etat dont le principe est schizophrénique: « L’affirmation d’un caractère anti-institutionnel des institutions de la politique culturelle » Il avait noté avec surprise que le Ministère de la Culture se voulait en quelque sorte un ministère subventionnant la transgression de toute chose.

 

La Polémique

Au moment de son apparition, cette politique provoqua une vive polémique.

Lors d’un colloque consacré à l’étude des premières archives historiques ouvertes sur le début de la présidence de François Mitterrand de 1981 et 1985, Laurence Bertrand Dorléac, professeur à sciences Po et spécialiste de ces sujets, a fait l’étude de cette résistance.

En examinant la presse elle constate que la critique vient principalement de la droite libérale qui estime que la direction de l’art n’est pas un Service qui doit être confié à l’Etat. Elle craint l’instauration d’un art officiel et ses  inconvénients pour la création. La critique  vient aussi des communistes,  ils savent qu’ils en feront les frais.

Très rapidement la polémique a disparu des médias, qui adhérèrent massivement à cette politique messianique qui veut « sauver l’avant-garde ». Les opposants sont devenus des « réactionnaires » à combattre par des lynchages médiatiques en meute. L’accusation vraie ou fausse d’appartenir  à l’ « extrême droite » est depuis trente ans le seul argument opposé aux contestataires.

En 1992, la chape de plomb est telle que lorsque Jean Philippe Domecq a fait paraître son fameux article dans Esprit,  la nouvelle se répandit comme l’éclair. 

Le livre de Marc Fumaroli paru, à peu près au même moment,  s’est vendu à des milliers d’exemplaires. Marc Fumaroli parlera de « posture » vichyste: qui consiste à instrumentaliser art et culture pour éduquer le peuple. Il pense que c’est cet esprit qui préside à l’action de Malraux en 58 et de Jacques Lang en 81.  Diriger l’art avec « des bons sentiments » est pour lui un abus d’autorité qui assure avant tout la médiocrité.

 

L’engrenage fatal : cooptation et satellisation  

Dotés de budgets, de lieux et d’un corps de fonctionnaires, les institutions ont exercé leur pouvoir par cooptation.

Au début l’inventeur du système, Claude Mollard, avait prévu dans les institutions la représentation des artistes. Dominique Bozo les a supprimés :  « l’art était chose trop sérieuse pour être décidé par des artistes ».

La cooptation concerne les artistes et les acteurs naturels de la vie artistique. Ainsi, les institutions préfèrent collaborer étroitement avec la FIAC, les réseaux newyorkais, les foires internationales. En même temps elles affament les Salons et condamnent, par une concurrence déloyale, les galeries indépendantes. Ainsi a été déréglé gravement le marché de l’art en France.

Les galeries sélectionnées pour participer, avec l’aide de l’Etat aux foires internationales ou à la FIAC, ne choisissent pas pour autant  librement leurs artistes, un quota très important d’artistes, ne vivant ni ne travaillant à Paris, en majorité allemands et américains, sont imposés.

A vrai dire les choix artistiques de l’administration française se sont fait pendant 30 ans en réseau avec des galeries et des collectionneurs new yorkais, aux choix exclusivement conceptuels. C’est à New York qu’a été dépensé 60% du budget annuel consacré à l’achat d’art en France,  dans des galeries New Yorkaises, d’artistes y vivant et y travaillant. Cela à détruit la place de Paris. 

Dans ce jeu la peinture a été condamnée. Elle a été exclue des commandes publiques et des achats. Les dernières galeries de peinture ont été exclues de la FIAC en 1993.

 

  L’Etat est devenu le cœur de l’unique réseau de consécration. Comme le soleil, il satellise artistes, galeries, grands médias et collectionneurs. Ceux-ci sont réunis en une association, l’ADIAF, crée en 1994. Son but est de « travailler en partenariat avec l’Etat afin de « faire rayonner la création française dans l’international ». Les associations amies, partenaires subventionnés, sont aussi réunies en une association, le « CIPAC », Elle fonctionne au plus près de l’Etat et, comme une corporation, elle veille jalousement sur la manne distribuée. Enfin en ce qui concerne le mécénat, les entreprises sont invitées à travailler en partenariat avec le ministère. Progressivement en France l’argent privé dans le domaine des arts tombe dans les poches de L’Etat sans assurer une diversité artistique, comme c’est le cas partout ailleurs.

D’une part la bureaucratie coopte, en France, les artistes émergents avant la sanction du marché. D’autre part elle consacre, par des achats pour les collections muséales françaises, les artistes dont les réseaux newyorkais font la cote. Cela sans exiger aucune réciprocité pour les artistes français.  Ses artistes français, qu’ils soient officiels ou non, ne sont  pas reconnus dans l’International. Le Kunst Kompass, Artprice affichent peu de français dans leur classements. Deux noms d’artistes officiels apparaissent dans les rangs reculés : Buren et Boltanski. C’est peu et ils sont très vieux. 

Alain Quémin en 2003 a fait une étude sur le mystère qui entoure cet échec. Les résultats ont fait scandale. 

 

Du berceau à la tombe

Les inspecteurs décident du contenu de l’enseignement des Ecoles d’art prestigieuses de l’Etat. Ils ont interrompu la transmission des savoirs dans le domaine du dessin, de la sculpture, de la gravure afin de solidement établir en France leurs choix exclusivement conceptuels,

Cette bureaucratie a aussi contribué à détruire « le milieu de l’art » à la française : communauté de destin, société non conformiste et libre, réunissant autour des artistes, les intellectuels, amateurs et marchands. C’est la conception américaine qui a pris le dessus, définie par Arthur Danto, affinée par George Dickie : le milieu de l’art est devenu l’ensemble des « galeries-collectionneurs-institutions-médias », fonctionnant en réseau pour fabriquer de la valeur financière.

L’exception française est que les inspecteurs font office en France de « milieu de l’art ». Ils sont à la fois : théoriciens, commissaires d’expositions, membres des commissions d’achat et de la commande publique.

Les artistes campent désormais devant les lieux du pouvoir et tendent la main. Ils sont concurrents et isolés. La décomposition du milieu de l’art « à la française », est une des causes majeures du déclin de Paris.

 

Le déclin français

Entre 1981 et 1990, deux systèmes ont cohabité en raison d’un marché de l’art international très actif et varié. Il existait alors un secteur public conceptuel et subventionné et un secteur privé, très divers.

Après l’effondrement du marché de l’art en 1990, les galeries ont été très affaiblies et le pouvoir des inspecteurs est devenu casi absolu. Jusqu’à maintenant leurs critères demeurent mystérieux. L’Etat, jusqu’à il y a peu, était le principal collectionneur en France et ne collectionnait que du conceptuel. Les artistes français avaient une conscience vague de ce qui se passait dans l’International et ne distinguaient pas le jeu entre Paris et New York.  « L’expertise scientifique » des inspecteurs ne faisait aucun doute pour les médias.

Depuis 2008 cet ordre connaît de grandes modifications. On assiste à un basculement du pouvoir… Pour raisons de crise la nouvelle stratégie du marché financier de l’art et d’être le plus mondialisé possible. Paris est choisi par les grands réseaux comme le « lieu de mise en vue » des produits dont on fabrique la cote. En quelques mois les galeries newyorkaises se sont installées dans la capitale. Gagosian a couronné ce mouvement. Les lois et règlements qui régissaient le marché en France ont été modifiés pour être compatibles avec les pratiques du marché anglosaxon. L’Etat joue aussi le jeu en prêtant ses lieux de prestige. Le Louvre, Versailles, le Grand Palais,  servent de « show room ». Leurs statuts sont adaptés à ces nouvelles fonctions.

Les budgets ministériels, pour la première fois en baisse cette année, sont   de plus en plus absorbés par le fonctionnement des institutions.  Il y a moins d’argent pour la création.  Le pouvoir, le prestige des inspecteurs s’en trouve réduit. Ceux-ci sont de moins en moins les vrais prescripteurs. Ce pouvoir est aujourd’hui entre les mains des marques, des grands collectionneurs, qui investissent auprès des administrations afin de créer des évènements, de la visibilité, de la légitimité pour fabriquer les cotes

Avant 2008 les conflits d’intérêt entre le privé et le public existaient fortement mais n’étaient pas perçus par le plus grand nombre. La crise a fait comprendre comment fonctionnait le nouveau « milieu de l’art ». Le commun des mortels sait ou et comment se fabrique la valeur. Il a perçu que les critères sont la visibilité, la communication et le scandale, via le détournement du patrimoine. Il sait que l’art contemporain  se porte mieux que jamais à l’abri de ses réseaux rationalisés et fermés. 

Les analyses de Marc Fumaroli, de Jean Philippe Domecq datent d’il y a 20 ans, celles de Marie Sallantin d’il y a dix ans. Elles restent d’actualité.

 

Allez sur ragemag

Pour y lire un texte que je viens d’écrire sur l’exposition « Mirages d’Orient » à la Fondation Yvon Lambert en Avignon.

http://ragemag.fr/les-marchands-dart-sont-surtout-des-marchands/

Allez sur face à l’art

Pour y lire la révolte des étudiants de l’école d’art d’Avignon, qui ont réussi a virer leur directeur, harceleur moral, intellectuel et sexuel : www.face-art-paris.org/

 

Allez sur internet !

Vous pouvez retrouver ces chroniques en allant sur le site : www.schtroumpf-emergent.com

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